Balade dessinée

Misery loves comedy d’Ivan Brunetti
23 décembre, 2010, 19:42
Classé dans : critiques

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Misery loves comedy est le bouquin le plus corrosif, le plus dérangeant, le plus trash qu’il m’ait été donné de lire et le lecteur éventuel devra , avant  de se lancer dans cette lecture, réviser son catalogue d’onomatopées ou d’éructations étonnées  pour la qualifier : «  oups, argh,  oh lala »   ont fait personnellement parti de mon registre. Et là, je fais dans le soft.

Que raconte Misery loves comedy ? Lebouquin décline le Moi , l’incontournable Moi  , le Moi immense et névrotique désigné sous le nom d’ Ivan Brunetti , auteur américain d’origine italienne, enseignant à ses heures, auteur de comics psycho dépressif à coté desquels Blast ou From Hell passeraient presque pour des gentilles fables, fraîches et joyeuses. Le présent volume est composé de trois numéros de «  schizo », sa revue,  et de contributions à divers quotidiens. Il alterne histoires courtes, où l’auteur se met en scène, et strips trashs. On en sort pas indemne.

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Le goût pour la dénégation de soi et la frustration artistique trouvent là,  en effet, une œuvre des plus abouties. Brunetti ne s’aime pas, ne nous aime pas, n’aime pas le monde : « Ma vie sera – - t – elle toujours aussi merdique ? ( … ) ma médiocrité me monte à la gorge comme l’odeur d’une flaque de vomi frais  ». «  Il n’existe probablement personne que je n’ai, à un moment ou à un autre  rêvé de tuer, de défoncer et / ou couvrir de merde »  Le discours tenu est d’un terrible pessimisme et d’un noir si définitif qu’il semble parfois sur-joué. Le monde de Brunetti est violent : violence des mots et des situations, violence névrotique, full of frustration, peur de la mort … Point d’issus, dans chaque vignette dans ce monde « merdique » , saturé de contrastes noirs ou de mots envahissants. Misery love comedy est une oeuvre cérébrale et bavarde où la réflexion en vient à saturer l’espace d’une logorrhée répétitive. 

Mais bon : admettons que la vie soit si négative et le monde si merdique, le plus étonnant est que Brunetti a tout faux : il a du talent, énormément de talents. Il passe d’un style à l’autre , s’amuse ( oui s’amuse ! ) à égarer les pistes stylistiques, s’essaie à imiter ses glorieux ainés. Dès lors, on serait tenté de voir dans cette démarche un jeu, une comédie, comme l’explicite le titre et ne pas le prendre ( trop ) au sérieux. 

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L’originalité majeure de Misery loves comedy est de poser de la manière la plus achevée qui soit la question  des limites. Jusqu’où peut – on aller dans mauvais goût ? Le contournement de  « valeurs » , la marge ? Comme dans  « c’est arrivé près  de chez vous » – film culte -  Brunetti renvoie sans cesse le lecteur à sa qualité de voyeur et l’invite à un retour au stade anal où le caca fait office de valeur et le pipi de tradition.

L’expérience de lecture n’est  pas sans intérêt et on est, c’est selon, à la fois enthousiaste ou dérangé.  Evidemment , on pense à Joe Matt , à Robert Crumb, et l’œuvre se rattache indéniablement  à la bd underground. Au vrai, plus qu’underground on songe à ‘’ border line ‘’ pour nommer le brûlot créatif que l’on a entre les doigts. Cependant, autant les deux premiers  numéros de Schizo sont d’un trash absolu , autant l’auteur semble se calmer au troisième numéro , revenant à des considérations plus apaisées , et finalement plus rigolotes… Brunetti commencerait – il à devenir adulte ? On le lui souhaite !

5xok


Un commentaire
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  1. Bruce

    Cet ouvrage me donnait envie… Je saurais m’en souvenir grâce à toi quand j’irai chez mon libraire. Passe un bon réveillon en tout cas.



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