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Je crois que je vais rester sur la berge. C’est mieux comme ça, c’est plus calme.
Je crois que je vais rester sur la berge. C’est mieux comme ça, c’est plus calme.
Je poursuis patiemment mon histoire de Montgolfière dont j’ignore absolument où elle va me mener, même si j’ai quelques pistes. ça tombe bien puisqu’il y est question d’errance. C’est ma petite odyssée à moi. Le scénario se construit à l’envie : là une petite touche d’humour, là un personnage à creuser, et chaque idée en entraine une autre. Je vais appuyer cependant sur le bouton » pause » histoire de mieux savoir où je vais.
A côté de ces travaux d’hiver le carnet est toujours en bandoulière et le temps assez clément autorise quelques sorties. Si d’aventure il pleut, restent les pubs et ses clients ou les tramways bondés…
Et puis l’inspiration étant un peu en panne, je tente une forme de dessin plus simple, plus spontanée, dans des petites cases en gaufrier – mais pas toujours . C’est un peu un labo où je teste et farfouille le trait. Il s’agit de dire les choses vites. Journal du quotidien, petites choses vécues, ou aperçues, me remémorant des paysages , des visages et les croquant au mieux : pardon à ceux que je vais offenser ci-dessous et qui se reconnaîtraient ! Parfois le crayon vagabonde et c’est l’imaginaire qui parle.
- Et toi ? Qu’est ce que tu as ressenti ?
- Rien, ça ne me parle pas, ça ne me dit rien. Quelque chose me gêne, c’est tout.
- Moi je me sens en deuil, on m’a volé des amis.
- « Je suis Charlie » , jusqu’où ? Jusqu’où ça me touche ?
- C’est violent, c’est cru, on bascule dans autre chose.
- Dans autre chose vraiment ? Rien ne change : ça fonctionne. C’est la même routine, c’est désespérant. ça interroge.
- Qu’est ce qu’il y a qui ne va pas ?
- Moi je me sens mal. Comment on peut avoir confiance en l’autre désormais ? On m’invite à avoir peur. ça me dérange.
- Et comment on fait pour vivre ainsi ? Si c’est la frousse qui commande, alors c’est mal barré. Est ce que je dois me méfier d’elle ?
- Ou de lui ?
- J’ai pas peur, c’est ce que voudraient les assassins , mais je suis en colère. J’en ai marre des cons, j’en ai marre de la connerie humaine.
- On veut nous diviser, ça sent mauvais. Faut être orgueilleux, faut rien céder.
- Il paraît que les crises sont salutaires, peut être que de cette tambouille sortira du bon ? Peut être qu’on donnera les bonnes réponses ?
- C’est mal barré. On a tout eu, tout ce qui était le plus prévisible, le mieux balisé, le plus facile.
- Des phrases creuses, des unanimités feintes, des réponses médiatiques.
- Qu’est ce que tu vas faire ?
- Dessiner, peut être, si j’y arrive. Et toi ?
- Relire tout Cabu et Wolinski.
- J’en ai même pas dans ma bibliothèque.
- Marre de cette histoire, marre d’en parler, marre d’y penser, envie de cocooner, rester chez soi.
- Je comate devant « six feet under » , hasard de la programmation.
2 février, 23 heures, dialogue :
- « Rien n’a aucun sens, c’est ça qu’il faut comprendre ? »
- « Ne sors pas ces conneries existentialistes. J’attends mieux de toi. L’essentiel est juste devant toi. »
- « Désolé , je ne vois rien »
- « Tu n’es même pas reconnaissant n’est ce pas ? »
- « Reconnaissant ? Pour la plus affreuse expérience de ma vie ? »
- « Tu t’accroches à ta douleur comme si elle voulait dire quelque chose. je veux te dire : elle ne vaut rien, oublie. Les possibilités sont infinies et il ne fait que gémir ! »
- « Que dois je faire ? »
- « A ton avis ? Tu peux faire tout ce que tu veux veinard. Tu es vivant. Qu’importe un peu de douleur par rapport à ça ? »
- « ça ne peut pas être aussi simple »
- « Et si ça l’était ? »
- Et si ça l’était ?
- Si ça l’était, alors on peut continuer à acheter Charlie.
- Et puis le lire.
- Et puis passer à autre chose.
L’année qui vient je serai tout le temps calme. Je ne me laisserai pas envahir par le tumulte du monde. Je ne chercherai plus à fuir.
Je serai en harmonie avec moi même et les autres. Je serai amoureux, j’accepterai d’être aimé. Mes frustrations ne prendront jamais le pas sur ma raison.
Je resterai humble et indulgent, voyant dans les faiblesses des uns le miroir de mes propres manques et dans les forces des autres des ressources pour vivre mieux. Je serai ouvert, conscient, disponible mais je saurai aussi m’isoler et créer.
Je serai patient dans les files d’attente, j’ouvrirai mes factures le jour même.
Je mangerai 5 fruits et légumes par jour ( ça c’est dur ), je cesserai de jouer à starcraft contre trois adversaires ( c’est trop dur ), je lirai enfin les bd que j’achète, je ferai un dessin par jour.
Et pourquoi pas ?
Merci à Swamps pour ses conseils sur la vignette 6 !
Moscou, octobre 1973. Le temps est lourd et brumeux.Vladimir temporoff découvre dans une malle un mystérieux code secret dont il pense qu’il peut déstabiliser les fondements de notre civilisation. En fait il se gourre car c’est juste des vieux dessins des temps boutonneux. La redécouverte de ces esquisses est pour lui l’occasion d’un retour sur l’alter égo que se crée l’ado quand il a pas encore lu Dolto, et évité soigneusement de lire Brecht et Schopenhaur.
Le double super égo veillait sur l’ado que j’étais comme un Jiminy Cricket du délirium tremens.
Of course, il était toujours là quand il le fallait , là où il le fallait.
Pour niquer le dirlo, l’abruti, les complexes , Buzz l’Eclair bondissait, réduisait , écrasait, explosait, anéantissait. Sublime défoulement.
Hum comme c’était bon ! Et que de joutes magnifiques j’imaginais promenant mon chien !
La tête ailleurs l’imagination fonctionnait plein tube.
Et puis il faut reconnaître que le métier avait quelques attraits … mon moi fantasmé avait un succès fou.
Sans doute n’est – il pas innocent que les aventures des super héros se déroulent dans un monde de tours qui, comme chacun sait, sont des symboles extrêmement parlants de la puissance du … euh … du secteur tertiaire.
C’est fou tout ce qui peut remonter à la surface avec une feuille tombée du panier. Un truc de gosse qu’on fait revivre rien que pour le plaisir, un peu aussi celui de retrouver New-York, une ville miraculeuse.
Une promenade avec un fantôme.
Comment est ce qu’on met fin à ces trucs de gosse ? Peut être ai- je fait mourir mon héros après un combat titanesque.
A moins qu’il n’ait disparu peu à peu de lui-même…
Faut dire qu’à l’époque j’étais résolu à me concentrer sur mes études.
Je pense que le passage à l’âge adulte doit ressembler un peu à cette vignette de Chris Ware, sûrement une des plus chouettes de l’histoire de la Bd ( je ne sais pas si j’ai le droit de publier une image de Chris Ware, peut être que si je dis que Jimmy Gorrighan c’est génial, qu’il faut lire Jimmy Gorrighan alors ça le fera ? )
Ou à cette photo de Gregg Sigal. La chute des géants en direct. L’homme d’acier dans le camboui, et retour à la case départ.
Superman est mort et les dieux sont partis, il n’y a plus rien , le réel a tout envahi et le décor s’est endormi.
De fait quand j’ouvre ma chemise je ne vois guère qu’un ventre bedonnant, certifié 100 % houblon.
Et mon quotidien est entouré de gosses qui se croient supers.
La métamorphose n’a pas eue lieu. Le monde esr normal, peuplé de gens normaux.
Mais même dans ce monde normal il y a des supers plaisirs, et des supers moments. Et on serait super cons de passer à côté.