L’écho du ciel ( épisode 3 )
Où sommes-nous capitaine ?
Je l’ignore petit, je n’ai rien connu de tel. Tout est nouveau pour moi. J’ai l’impression de ne rien savoir.

Ne rien savoir ? Comme c’est étrange.

Ne t’y trompe pas mon garçon, ce calme inquiétant annonce …

… la tempête !!

Ça tangue ! ça balaie ! ça secoue ! ça chahute ! ça retourne ! ça culbute ! ça louvoie ! ça remue !

L’écho du Ciel est balloté au gré du vent. Petite carcasse fragile et délicate, elle ne sait plus quel chemin emprunter.

T’es où Petit ?! C’est la tourmente ! Faut s’accrocher !

Je m’accroche capitaine ! Je m’accroche !

Boris ! On a besoin de toi !! fais cracher les moteurs et optimise les paramètres !

- Ça va être dur capitaine !
- Qu’est ce que tu racontes Boris ??!

Y’a des facteurs externes qui m’empêchent d’optimiser !!

Et le navire tanguait tanguait ( chanson ancienne ) !

Dialogue : Oups ! Aîe ! Oh la la ! Aaaaahh !

Soudain c’est la chute , inattendue , imprévisible !

Et la tempête laisse place à un ciel chargé mais sans aspérités !

Quel étrange phénomène est ce là ?! Jamais je n’ai vu une telle bourrasque s’éclipser à cette vitesse !

Restons vigilants , je doute que le nuage en ait cessé avec nous et suspecte quelque sombre scénario , il est probable que …

Le capitaine se tait et ses yeux s’écarquillent, au loin une forme gigantesque se dessine entre les volutes…

… qui laissent apparaître une jeune femme, tranquille et triste à la fois,

D’abord intrigué le capitaine se fige , sans voix, puis murmure :
… Chimère, le nuage est une chimère.

Ça va passer petit. Une traitrise de l’esprit, une fourberie maligne inventée par quelque esprit tordu : voilà ce qu’est ce nuage !

C’est Manon Poupidoo ma dernière passion, où ça y ressemble en tout cas. J’avais mis cette affaire sous le tapis. Classée, archivée, fi-nie … mais le nuage est une petit malin.

A peine a – t – il achevé sa phrase qu’une nouvelle forme semble se dessiner au loin et c’est Jul , cette fois , qui s’émeut !

Grand dieu !

C’est la vision que j’avais dans mes cauchemars d’enfant : cet énorme mammifère me poursuivait jusque dans mes nuits les plus profondes. J’avais oublié cette crainte là…

Le capitaine enchaine : Le nuage prend la forme de nos tourments, c’est là sa force, il s’en nourrit. il devine nos failles, s’insinue dans nos âmes. Il va là ou ça fait mal.

Oui le nuage est dangereux : Il tétanise. Il empêche d’avancer. Il est la peur de notre monde. Ceux qui n’ont jamais réussi à le traverser n’ont pas su dépasser cette crainte. Elle a fini par les envahir.

La seule attitude à avoir est de rester calme. Le nuage le sentira, aussi sûrement qu’il a senti notre inquiétude. Soyons plus fort que lui. Soyons calmes et avançons. Confiance petit !

Comme en réponse aux propos du capitaine, l’écho du ciel longe un appareil : c’est celui de John Ranquedal !!

Son avion figé pour l’éternité, crispé sur son siège … quelle sinistre vue l’a ainsi tétanisé ?

Nul ne le saura jamais.

à suivre …
L’écho du ciel ( episode 2 )
Ce jour d’April 756, l’Echo du ciel survolait la mer d’Arasse. Le vaisseau était libre de tout passager et rentrait à son port d’attache après une longue mission.

Le voyage se passait bien : la vitesse de croisière était de 80 kilomols ,la température de 70 gredés, le vent à charge portante de 120 millitibares. Des conditions optimales.

Pourtant le front du capitaine était barré de rides graves, dissimulant mal des pensées soucieuses, inhabituelles chez le vieil homme.

Comme si ses pensées prenaient forme, ses traits s’animent en un instant et son regard est saisi de surprise.

Devant lui un phénomène stupéfiant se produit : une coulée noire surgit du ciel et rejoint l’océan en un éclair.

Suspendue un temps entre ciel et mer, la colonne s’écrase enfin sur les flots, envahissant l’espace alentour de noires ténèbres.

Une barrière.

Le Capitaine sait qu’on ne sait rien sur ce nuage. Tout le monde le craint car personne n’en est jamais revenu. Le célèbre pilote John Ranquedal se targua d’être le 1er à le défier. Il reste de lui une photo.

John Ranquedal, peu avant sa tentative de traversée du nuage noir.
Et une veuve inconsolable.

Josephine Ranquedal lors de la surprise party organisée par le comte strodof en hommage au disparu.
D’où venait – il ? Que cachait-il ? Pourquoi disparaissait il pendant des siècles pour réapparaître subitement sans s’annoncer ? Les savants les plus éminents ne pouvaient qu’avouer leur impuissance .

Le professeur Van Doonguen avait bien tenté, un temps, d’en comprendre les mécanismes , mais sa reconstitution du phénomène, présentée à l’académie des sciences de Versaugue ne rencontra que des moues dubitatives, voire une certaine hostilité.

A raison semble-t-il .

Mais tous, savants ou ignorants, étaient saisis d’effroi devant le souvenir ancien de la destruction de Fort Brune en 389 post Kim Wilde, telle que la narrait la chronique de Remy l’ancien .

Le nuage noir. Il était là, devant lui. Pourtant le navire ne dévie pas de sa route et, au contraire, oblique résolument vers la source inquiétante.

Au fond de la cabine de pilotage un jeune homme, tapi dans l’ombre, observe la manœuvre avec inquiétude.

Et bondit :
- Par pitié capitaine ne commettez pas l’irréparable, nous pouvons encore faire demi-tour !
-Les dés sont jetés petit, le nuage avance vite, trop vite. Il est rapide, étonnamment rapide. Le fuir n’a aucun sens. Je ne fais pas de bon ou de mauvais choix, je fais la seule chose à faire : avancer.

Le nuage est un mystère, certes, mais ne faisons pas parler notre peur, ou alors c’est nous qui nous perdrons. Nous verrons bien, une fois à l’intérieur, à quoi nous en tenir. Tout ira bien petit, tout ira bien.

Le jeune homme ne peut s’empêcher de sourire en entendant les paroles du capitaine. Il se souvient de sa rencontre avec lui et de cette phrase, toujours la même :

Tout ira bien petit … tout ira bien.

« Petit », c’était Julien, dans l’état-civil. « Jul » pour les intimes. Un habitué des quais dès son plus jeune âge.

LA ciTé méCano de Worluf était, à cette époque, le centre de maintenance de la plupart des vaisseaux qui circulaient sur le continent ouest.

Jul était orphelin et traînait dans les abords de la ville haute où il vivait de petits boulots

Mais il commençait à se lasser de cette vie précaire et aspirait à une autre destinée.

Pour certains la première rencontre avec un ami se fait par un sourire, un échange de regards, une plaisanterie … Pour Jul, elle prit la forme de deux mains puissantes et impératives.

Pour quelle raison le capitaine prit-il sous son aile ce juvénile travailleur ? Nul ne le sait.

Mais il se passa assurément quelque chose entre ces deux-là.

Tout dans cet homme plaisait à Jul : sa jovialité, sa légèreté, son goût pour l’autre, et le vieil homme voyait sans doute en lui une part de sa jeunesse insouciante.

Jul fut engagé tout de suite comme « mousse » et au soir naissant il savait que son destin s’était ouvert à tous les possibles…

Et le possible ressemblait ce jour là à des volutes menaçantes .

Et soudain, le noir.


à suivre ….
l’écho du ciel ( épisode 1 )
On a raconté bien des bêtises sur L’écho du ciel et cela n’est guère étonnant car le vaisseau dirigeable a toujours navigué avec les histoires, celles qu’il vivait, celles qui s’accrochaient à son sillon.

A cette époque , le vaisseau transporteur était le joyau de la flotte de dirigeables qui écumait le ciel de Pomérahnie. Quoiqu’ancien il atteignait une vitesse au vent de 150 kilomols et avait une capacité de 24 métavroum en charge pleine, ce qui n’était pas rien.

A l’armada du siècle de Rouhan , qui accueillait tous les 6 ans les plus beaux vaisseaux du continent occidental, son apparition déchaînait les foules et il était toujours l’un des plus applaudis.

Il n’était ni le plus beau ni le plus rapide des navires des airs mais était assurément l’un des plus anciens et, à ce titre , son nom était chargé des légendes qui gravitent autour des vieilles choses.

De façon irrégulière, il assurait la liaison entre les îles de Fortalezo et de San Vincento dans l’archipel des Galapagausses, mais il pouvait aussi être mobilisé pour d’autres missions de transport ou de prestige, selon les saisons et les demandes locales

L’habitacle du vaisseau était rustique mais élégant. Le plancher sentait bon la patine du temps et grinçait doucement au rythme des pas des voyageurs. Les fresques avaient certes perdu un peu de leurs couleurs, mais rien de leur charme

Les rares voyageurs, car le parcours était cher, avaient le sentiment d’une expérience unique . Ils « planaient » littéralement au dessus de leurs soucis.

L’homme qui était en charge d’un tel vaisseau ne pouvait être qu’un homme rare : le capitaine Achap.

Depuis plus de trente ans il présidait aux destinées de L’écho du ciel. Nul ne savait comment il en avait fait l’acquisition et les rumeurs les plus folles circulaient sur son compte.

Certains prétendaient qu’il l’avait gagné au jeu du majongh dans un des bouges de Thaî-pu.

D’autres qu’il l’avait dérobé sans ménagement à la confrérie militaire du temple de Kroare.

De tout cela , Achap ne disait rien. Il souriait, et c’était là sa seule réponse : un contentement sourd, une tranquille insouciance… Achap était un homme heureux .

Au dessus du vaste monde il avait vu tant de beautés qu’elles avaient fini par l’habiter littéralement. Quel autre homme pouvait se vanter d’avoir survolé les arbres géants de le forêt de Mégara ?

Ou les villages perchés de la vallée du Rift ?

Les chutes de zamboura …

Et l’entrée dans la ville sainte de Sancta Monica Lesinski ?

Achap était un homme heureux car il avait vu le monde de haut. Il s’était laissé guidé par les courants portants et en avait tiré une vision de l’existence positive.

« Si les vents sont changeants il faut juste adapter la voilure », disait-il de son œil pétillant.

L’Echo du ciel fonctionnait de la manière la plus élémentaire puisqu’il était mû par des boules d’hydrobahre, à la puissance de combustion inégalable.

Ce combustible était cher mais assurait une autonomie de 72 heures au dirigeable. Inutile de dire que pour Boris c’était un job en or.

Un homme étrange que ce Boris, qui profitait de son temps libre pour s’adonner à une ancienne mode : il lisait. C’était un boulimique, de Paris-Vroum aux œuvres intégrales de Khristof Gueppe.

Au fonds, son obsession était assez simple :

On savait de lui peu de choses jusqu’à ce que le professeur chaumskee, de l’université d’Arrevare fasse une découverte étonnante.

D’après lui , ce serait bien Boris qu’on apercevrait sur une photo du défilé du 13 January post 4 devant le général Kimmouneeel III

De retour de la guerre il découvrit les restes de sa ville natale, détruite, et en tira une haine pour la violence, profonde et viscérale.

A la suite de ces évènements on sait qu’il entama un repos au monastère de Tanislas. C’est là qu’il rencontra Achap .

Celui-ci se remettait alors de la rupture avec l’actrice Manon Poupidoo dont la presse pipole avait rendu compte avec une rare impudeur.

la relation entre les deux amis fut scellée après une soirée dont on ignore la teneur exacte. On sait seulement que le contentement des moines au sortir de leur retraite augmenta de dix points leur foi en dieu…

Cet homme était désormais lié au capitaine comme le plus fidèle des compagnons. Sans doute lui était – il reconnaissant d’avoir réalisé son rêve : Oublier son passé meurtrie.

Cette fine équipe voguait, au gré du vent et rien ne semblait devoir arrêter sa marche tranquille. Pourtant, un évènement rare, pour tout dire exceptionnel, allait bouleverser son avancée …

A suivre …
Merci à tous ceux ( ils se reconnaitront ) qui ont lu et fait évoluer cette histoire !